Champagne Gabriel Boutet Pourquoi boit-on du vin
Culturellement parlant, la vigne est liée au monde sédentaire. Il faut se fixer pour planter et cultiver. C’est pourquoi la vigne est toujours attachée à la ville et les nomades s’en sont toujours méfiés, d’où le rejet du vin chez les musulmans.
Abraham, par exemple, ne connait pas le vin. Quand son invité mystérieux se présente chez lui, il ne peut lui offrir que du lait. C’est Melchisédek, la figure du prêtre, qui apporte le pain et le vin à Abraham. Le patriarche peut ainsi découvrir ces deux aliments fermentés.
Les découvertes archéologiques les plus récentes l’attestent : le vin est apparu en même temps que la civilisation, au début de l’âge de bronze, 7 000 ou 8 000 ans avant J.-C. Son berceau serait la Transcaucasie (terre actuelle des Géorgiens et des Arméniens), où l’on a retrouvé dans des tombes des fragments de sarments gainés de fourreaux d’argent, ce qui prouve que la vigne, déjà, avait une signification sacrée.
En Mésopotamie et en Égypte, le vin fit son apparition après la bière, mais s’en distingua vite par sa faculté de durer et de se bonifier avec le temps. Réservé d’abord aux classes privilégiées, il n’a, depuis, cessé d’accompagner l’humanité, tant dans ses conquêtes que dans ses périodes de décadence. Dans la Genèse, on lit que Noé était vigneron. À Babylone, la culture de la vigne était placée sous les auspices de la déesse Siduri. À Athènes, on célébrait des fêtes en l’honneur du dieu du vin Dionysos. En Perse, à la cour du roi Jamshid, le vin était conservé dans des jarres afin d’être consommé toute l’année. Pendant des milliers d’années, le vin fut le seul antiseptique connu, en médecine comme en chirurgie. On l’appliquait sur les blessures et il servait à purifier l’eau. On lit dans le Talmud : « Quand le vin vient à manquer, les drogues deviennent nécessaires » et un traité médical indien de la même époque (VIesiècle avant J.-C.) décrit le vin comme « un tonifiant de l’esprit et du corps, un antidote à l’insomnie, à la mélancolie et à la fatigue, propre à stimuler ».
Le vin et la vigne aux temps anciens
La vigne semble être arrivée d’Arménie (voir mon article récent à ce sujet), puis elle se serait enracinée en Egypte où elle avait été considérée comme un cadeau d’osiris. On sait qu’à cette époque le raisin se mangeait frais ou sec.
Noé fut « le premier vigneron » connu pour cultiver la vigne (par un patronyme). A peine les eaux du Déluge furent elles retirées que Noé qui était cultivateur, commença à planter de la vigne. Il bu du vin et fut ivre. Son penchant pour le vin le plaça en délicate position. L’un de ses fils, quand il le voit tout nu, le couvre mais ses frères l’aperçoivent. Le mal est fait et Noé se sent humilié. Il assène à son fils Canaan une malédiction qui se propage à toute sa descendance.
Le Lévitique et le Deutéronome, des textes sacrés régissent les lois de la propriété des vignobles, le droit de glanage pour le pauvre et l’étranger ainsi que les règles de culture et de jachère.
Les gravures antiques des Egyptiens montrent que les ceps étaient adossés à des piles de pierres ou branches d’arbres telles des pergolas. Ils étaient taillés pour augmenter la production. Les vignobles étaient entourés de haies et de murets ou implantés sur des terrasses pour conserver un maximum d’eau de pluie Durant la maturation une tour de guet permettait de surveiller la récolte du bétail errant des voisins et des bêtes sauvages comme des renards qui ravageaient les vignes.
Les Grecs et les Hébreux buvaient le vin mêlé de résine, de miel et d’épices. Des amphores récemment analysées prouvent que les Egyptiens en 3 150 Avant Jésus Christ, infusaient déjà dans le vin leurs herbes médicinales : séné, sauge, mélisse, menthe, romain, coriandre…
Lectures d’articles de Florence et Marie José THINARD Ed Plume de carotte (2014).