CHAMPAGNE GABRIEL BOUTET ET LA REGLEMENTATION
La date de début des vendanges est fixée par le Comité Interprofessionnel du Vin de Champagne en fonction de l'état de la vendange qui diffère chaque année en termes de maturité des raisins, de degré d'acidité et de degré d'alcool. Pour déterminer avec précision cette date, un réseau de maturation sur 450 parcelles réparties sur l'aire d'appellation relève deux fois par semaine le poids moyen des grappes, leur richesse en sucre, leur acidité totale, leur pourcentage de véraison (c’est-à-dire de maturation et de pourriture grises). La synthèse des résultats indique l'avancement de l'état de maturation des raisins et permet aux responsables techniques et aux correspondants régionaux de l’Association Viticole Champenoise (AVC) de proposer la date d’ouverture de la cueillette dans leur commune.
La date fixée, on lève le ban des vendanges. Elle a lieu en général après la mi-septembre. La vendange est manuelle et dure environ 3 semaines. On récolte le raisin par grappes entières. Le tri de la vendange se fait dans le vignoble pendant la cueillette : les baies altérées, les baies atteintes par la pourriture grise (botrytis cinerea) et les grappes pas suffisamment mûres ou d'une maturité excessive sont écartées. La vendange doit être saine.
La vendange reste manuelle, mais des recherches sont en cours pour la machine dans les grands domaines. Les arguments cités par les adeptes des vendanges mécaniques sont : le coût (30% d’une vendange manuelle), la difficulté de recrutement de la main-d’œuvre, et la souplesse dans le travail et l’organisation de la récolte.
Afin d'éviter l'écrasement et les jus oxydés, des paniers de 8 à 10 kg sont utilisés pour la cueillette et 30 à 45 kg pour les cagettes dont le fond et tous les côtés troués d’orifices permettent l’écoulement rapide et complet du jus inévitable des raisins et des eaux de pluies éventuelles.
Afin d'éviter l'écrasement et les jus oxydés, les paniers et cagettes utilisés pour le transport des raisins du lieu de la cueillette jusqu’à l’installation de pressurage sont de petite capacité respectivement de : 3 kg pour les petits paniers et 45 à 50 kg pour les cagettes qui comportent au fond et sur tous les côtés des orifices permettant l’écoulement rapide et complet du jus inévitable des raisins et des eaux de pluies éventuelles.
Les cagettes sont amenées sur des tracteurs jusqu'au pressoir, où le raisin entier est réceptionné.
La tradition prime encore
Les baies botrytisées ne sont pas acceptées au pressoir, car le botrytis renforcerait les teneurs en sucre des moûts. Le botrytis est, autant que faire se peut, évité ou éventuellement trié, car il entraîne une certaine fragilité des vins à l’oxydation, combinée à une certaine lourdeur marquant les vins et masquant la finesse et la fraîcheur.
La tendance actuelle est de vendanger à la maturité (le degré minimum étant fixé en moyenne à 9,5% de potentiel alcoolique pour l’ensemble des villages qu’ils soient de PREMIER CRU, de GRAND CRU ou de CRU, 11,5% pour la vendange les années de MILLESIME.
Nul ne peut vendanger s’il n’a pas fait de prélèvements avec le réseau maturation de 602 parcelles (dont nous avons une parcelle témoin à mi-coteaux sur CUMIERES plantée en 1983 de Pinot Noir dénommée LES FLAMMES CHIENS référencée A.V.C. Association Viticole Champenoise) avant la date fixée par l’interprofession. La vendange est promulguée par le préfet après lecture des résultats des degrés de maturité par village. (voir lettre de Patricia du 12 novembre 2019)
Il faut en moyenne 1,200 kg de raisins pour faire une bouteille de Champagne. Au stade du pressurage, on trouve dans le moût 70 à 80 % d’eau, 17 à 20 % de sucre et 5 à 10 % de substances diverses. Dans un litre de Champagne terminé, on trouve environ, pour l’essentiel : 93 g d’alcools, 1 à 36 g de sucre (glucose et lévulose), 4 à 10 g d’acidité totale (exprimée en grammes d’acide sulfurique), 5 à 8 litres dissous de gaz carbonique, 16 à 22 g d’extrait sec minéraux, dont 2 g d’origine minérale (environ potassium, calcium, magnésium, fer, de très petites quantités de cuivre, de zinc et de manganèse), des tanins en quantité infime et de nombreux acides aminés dont une dizaine de vitamines, pour la plupart du groupe B, une douzaine d’esters qui participent à l’arôme secondaire, quelques grammes d’anhydride sulfureux antiseptique. La densité du Champagne (rapport de la masse de son volume à 20° à la masse du même volume d’eau à la même température) oscille entre 990 et 1005, selon son titre alcoométrique et son dosage en sucre.
Les pressoirs pneumatiques à membranes, détrônent actuellement les anciens pressoirs à maie ou à vis. Le système champenois, en pratiquant ainsi, a trouvé un avantage à récupérer des jus d’une plus grande finesse. Les rendements en jus sont moindres, 400 kilos de raisins donnent 2500 litres de moûts.
Il ne faut pas oublier que la quantité et qualité des bourbes laissées dans les moûts déterminent fortement l’aspect du vin après fermentation alcoolique. Un moût trop fortement débourbé fermente mal, les levures manquant de nutriments pour achever les fermentations alcooliques, un moût peu ou pas débourbé amène souvent des notes végétales et de forts goûts de réduction avec fermentations alcooliques tumultueuses.
Chez nous, nous évitons toute trituration des raisins, associé à un débourbage léger séparant seulement les particules terreuses du fond de cuve. Nous constatons un développement aromatique plus fin.
LES FERMENTATIONS
Le titre alcoométrique du Champagne est habituellement voisin de 12 %. Il est inférieur à celui des vins de Bourgogne par exemple, qui varie généralement pour les grands crus entre 12,5 % et 13,5 %. C’est l’éthanol (alcool éthylique) qui représente l’essentiel des alcools du Champagne. C’est un constituant fondamental car il apporte la vinosité, le corps et il joue un rôle capital dans la conservation du vin.
De nombreux autres alcools existent en petite quantité dans le Champagne. Le plus important d’entre eux est le glycérol qui, par sa saveur sucrée, apporte au vin du moelleux. Il y en a d’autant plus que le moût est originellement plus sucré à la vendange.
Le champagne ne contient que peu de méthanol (50 mg par litre), alors que certains vins rouges notamment en comptent jusqu’à 200 mg. Cet alcool n’est autre que l’alcool de bois. Nocif en quantités importantes, il provient des matières solides de la vendange, des pellicules en particulier, des pectines des membranes de la pulpe. Or celles-ci sont peu affectées par le pressurage champenois qui, en outre, comme on l’a vu, n’entame pas les pellicules. Le Champagne est le seul vin dont les raisins ne sont jamais foulés, exception faite de certains rosés.
Nous sommes actuellement, depuis la période de changement climatique, de facteurs essentiellement cycliques mais aussi de pollution de la stratosphère (satellites, fusées…), passés d’une vendange froide d’octobre à une vendange chaude de fin août jusque mi-septembre.
Les jus sont mis à fermenter en cuveries équipées de refroidissent des moûts afin d’éviter toute surchauffe lors de la fermentation alcoolique, ce qui provoquerait des gerbages de cuves et un développement non-voulu de ferments exogènes qui troublerait un départ fermentation alcoolique homogène. Les levurages sont encore peu fréquents, la moitié environ des vignerons préférant travailler avec les levures indigènes, en évoquant le fait que ces levures font partie intégrante du terroir et des caves.
Les températures en cuves atteignent généralement un pic de 22 à 25°C pendant un temps assez court (entre 1040 et 1020 de densité). Les fins de fermentation alcoolique sont relativement longues et à température plus basse (18 à 20 °C). Entre fin fermentation alcoolique et début fermentation malo-lactique, les lies en suspension apportent un effet anti-oxydation important alors que les vins ne sont pas sulfités.
La durée totale de la fermentation alcoolique est généralement d'1 à 3 mois. C’est pendant cette période : fin de fermentation alcoolique / début malo-lactique à peu près jusqu’à la Saint Nicolas, en décembre.
Sur lie de malo, on peut même développer fortement des arômes « caramel au lait ». Il est intéressant de noter que le fait de remuer les lies enlève de petites réductions passagères et c’est, sur ces cas, une pratique très intéressante.
LES CONTENANTS
L’utilisation de futs neufs est à la fois historique et, comme partout, subit des effets de mode importants. Dans les années 60, globalement, sans moyens, il n'y avait peu ou pas de fûts neufs, juste pour assurer un renouvellement du parc de fûts.
Actuellement, la pratique du 1/3 fût neuf environ semble emporter tous les suffrages. La demande américaine très forte a fait exploser l’utilisation des fûts neufs, avec certains vins très caricaturaux. Le boisé se fond bien en quelques années sur de grandes cuvées, mais reste présent et maladroit sur des vins plus simples. Comme le sel dans la nourriture, certains y sont plus sensibles que d’autres, et indéniablement le goût fût neuf reste ancré pour une majorité de consommateurs comme un indice de vins de qualité.
Pour les vins de Réserve, la fin d’élevage en cuve permet de bloquer l’évolution et de leur assurer une fin d’élevage sur lie prolongée. Seuls les vins bien constitués (richesse, équilibre acide) supporteront un élevage prolongé sur fût, à condition de les laisser sur lie, en cave fraîche, et de bien veiller au niveau de SO2 libre (selon moi entre 15 et 20 mg SO2 libre). Ils peuvent de ce fait, gagner en complexité. Cette méthode requiert une surveillance accrue par la dégustation afin que cet élevage ne marque par trop les vins. C’est celle que j’ai choisie de continuer à utiliser puisque ce type d’élevage est traditionnel au domaine et donne d’excellents résultats. On dit que les vins élevés plus longtemps ont tendance à mieux vieillir, mais s’expriment un peu moins vite en bouteille.
L’APPROCHE DES COLLAGES A LARGEMENT EVOLUE
Traditionnellement on utlisait la caséine et bentonite. Cette méthode a encore des adeptes principalement quand on travaille au vaslin, avec très peu de débourbage. C’est alors une opération « nettoyage » quasiment obligatoire.
Anciennement, la mise en bouteille se faisait sans filtration, demandant un doigté supplémentaire au relevage de colle. Aujourd’hui, elle est suivie d’une filtration plus ou moins serrée en utilisant des filtres à terre (Kieselghür) ou membranes.
La tendance est à l’allègement des filtrations en pratiquant seulement des terres blanches dégrossissantes. De gros progrès ont été faits par rapport aux filtres, traumatisant grandement les vins.
Nous ne pratiquons aucun collage avec des protéines sur nos vins en cuves thermorégulées. Une fois en bouteille, le Champagne prend petit à petit sa pétillance grâce aux levures ajoutées. Ces levures seront expulsées au moment du dégorgement, environ 3 à 8 ans après la mise en bouteille qui sera vendue entre 3 et 6 mois après cette opération située juste avant l'habillage.
Significations de quelques mots utilisés en Champagne
Marc : Unité de pressurage. Terme utilisé en Champagne pour désigner une unité de volume de raisin destiné au pressurage. Un marc = 4000 kg de raisin. Le mot marc désigne également la masse compacte de parties solides (pellicules, pépins et rafles) que l'on retire du pressoir après extraction complète du jus de raisin. On parle de "aignes" en Champagne.
Aignes : mot utilisé en Champagne pour désigner l'ensemble des parties solides (pellicules, pépins et rafles) qui restent dans le pressoir, à la fin du pressurage.
Cuvée: mot utilisé en Champagne pour désigner les 20.5 premiers hectolitres de jus qui s'écoulent lors des premières presses d'un pressoir chargé de 4000 kg de raisins. Le mot cuvée désigne également le vin qui résulte de l'assemblage de différents de base. Le vin issus de cette cuvée sera mis en bouteille pour être transformé en Champagne.
Moût : c'est le jus qui s'écoule lors du pressurage de raisins frais non fermentés.